Lun. Mar 25th, 2024

Par Alexandre Baril-Lemire

Le 8 septembre dernier, à la surprise générale, les autochtones de la nation attikamek, vivant dans la région de la Mauricie, ont publié une déclaration de souveraineté.

Par cette déclaration, ce peuple, qui habite ces terres « depuis des temps immémoriaux » (je les cite), a jugé que les relations qu’il entretenait avec les gouvernements du Québec et du Canada étaient dans un « cul-de-sac ».

Constant Awashish, le chef de la nation attikamek, a déclaré que des projets de développement, notamment liés à l’industrie forestière, avançaient sur leur territoire depuis plusieurs années, et ce, sans que son peuple ne soit consulté.

« On ne demande pas la guerre », a-t-il déclaré à Radio-Canada. « On ne demande pas de se séparer, mais que nos droits soient pris en compte. Participer au développement du territoire, obtenir des dividendes. Faire de la cogestion, aménager le territoire en respectant l’exploitation traditionnelle de la forêt ».

Les Attikameks vivaient déjà sur ce territoire qui ferait, selon les dires de leurs dirigeants, plus de 80 000 kilomètres carrés avant l’arrivée des premiers Européens. Le peuple attikamek vécut en isolement jusqu’au milieu des années 1870, où les premiers contacts avec des missionnaires canadiens-français eurent lieu. Vinrent ensuite les épisodes des réserves, des pensionnats et de la perte de l’autonomie des peuples autochtones sur leur territoire, comme ce fut le cas d’un océan à l’autre.

Selon le chef Awashish, il y a encore des besoins à combler dans les réserves attikameks, où la majorité de la population a moins de 30 ans et où moins de 20 % des résidants ont terminé leurs études secondaires. Selon lui, l’amélioration des conditions de vie de ses confrères renvoie à leur accorder une plus grande place à la table des décisions qui sont prises sur leur territoire.

Malgré l’appel au calme du premier ministre Philippe Couillard, qui a rappelé que cette déclaration de souveraineté ne perturberait pas le paysage politique québécois, ce conflit vaut la peine qu’on réfléchisse à la situation de cette société d’à peine 6000 personnes qui, quelque part au nord de La Tuque, ont choisi de s’adresser directement aux autorités.

En effet, la situation des Attikameks est précaire : crise de logement, manque de financement en éducation, isolement… Ces problèmes font partie courante de leur vie depuis leur sédentarisation, au début des années 1900, à l’époque où les gouvernements fédéral et provincial ont commencé à octroyer des parties du territoire ancestral attikamek à des entreprises forestières, ne laissant aux habitants que des réserves où ils ne pouvaient pas subvenir à leurs besoins.

Ce contexte met en évidence la relation très étroite qui existe entre une société et son environnement. Il va sans dire qu’une société qui ne contrôle pas l’environnement où elle vit pourra très difficilement s’épanouir. Évidemment, comment offrir un niveau de vie décent à ses concitoyens lorsque l’on ne décide pas comment sera géré son territoire et que l’on ne reçoit pas de retombées économiques?

On se souviendra que, dans les années soixante, lors de la Révolution tranquille, les Québécois sont devenus « maîtres chez eux ». Les barrages hydroélectriques, détenus alors par des sociétés américaines, ont été nationalisés. Le gouvernement de l’époque s’est assuré d’avoir le dernier mot sur ce qui se passait dans son environnement. L’essor économique qui s’en est suivi n’a pas seulement permis de créer un système d’éducation moderne, mais a également servi de symbole d’unité et de fierté nationale. Bref, c’est sur ce désir de contrôler son propre environnement que s’est bâtie la société moderne dans laquelle nous vivons maintenant.

Aujourd’hui, au Québec comme dans les autres provinces, les sociétés autochtones, considérées pendant longtemps comme étant de seconde classe, veulent améliorer leur situation. Mais comment concilier nos deux cultures alors que nous vivons sur le même territoire? Peut-être que le moment de négocier avec ces nations d’égal à égal est venu…

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