Ven. Mar 29th, 2024

culture-birdman-sourceredcarpetcrash(3)L’absence de prise de risques et le manque flagrant d’originalité frappent énormément d’œuvres cinématographiques à l’instar des sept plaies d’Égypte. Le nouveau film d’Alejandro González Iñárritu amène toutefois son lot de fraîcheur et d’audace. Authenticité, charisme et poésie humaniste sont à l’honneur!

Par Alexandre Blanchard

Birdman est l’un de ces films complètement déjantés qui créent une expérience particulière. Pourtant, la prémisse du film ne laisse rien transparaître d’anormal. Riggan (Michael Keaton), ex-célébrité du grand écran avec son personnage de super héros justement nommé Birdman, tente de sauver ce qu’il reste de sa carrière en montant une pièce de théâtre. À l’aube des avant-premières, Riggan se débarrasse d’un acteur et le remplace par Mike Shiner (Edward Norton).

C’est alors que les choses dérapent tranquillement tant sur le plan professionnel, avec Shiner qui vient s’arroger la vedette et semer la zizanie avec l’actrice Lesley (Naomi Watts), que sur le plan personnel, avec sa fille (Emma Stone) à l’humeur morose. Bien qu’en apparence très simple, l’intérêt du film ne réside pas dans l’histoire qu’il raconte, mais plus dans la manière dont les protagonistes se comportent face aux situations mises en scène.

L’élément le plus frappant, et certainement le plus remarquable, qu’un observateur attentif aura assurément tôt fait de capter, en est un de forme : le film ne contient que des plans-séquences (un plan qui dure plus de dix secondes)! Dans le cas présent, j’estimerais que la moyenne de durée d’un plan varie entre cinq et dix minutes.

Le travail que cette manipulation savante de la caméra requiert et les détails reliés à la planification intrinsèque d’une telle démarche s’avèrent tout simplement époustouflants! Sauf à quelques moments précis, on ne peut même pas discerner la transition d’un plan à l’autre de sorte qu’on a l’impression que l’œuvre a été tournée en une seule prise! Cette réalisation technique à elle seule vaut le détour.

Il va sans dire que la dynamique du storytelling s’en retrouve complètement chamboulée : les ellipses sont nombreuses et il n’est pas rare qu’on assiste à un important bond dans le temps dans une même scène. Cette recette bonifie grandement une histoire de prime abord simpliste, voire un brin dénudé d’intérêt. Mais assez pour la forme, il faut bien préserver un peu le plaisir de la découverte!

Sur le plan du fond, Birdman se propose comme une œuvre excessivement et essentiellement philosophique. Bien que parfois confus, le thème principal concerne l’ego de Riggan et la recherche ardue et mélancolique de sa place dans l’univers, de son utilité en tant qu’artiste et être humain. Sous cet angle, le personnage qu’incarne Keaton se révèle bluffant : on croit à cet être qui se pense surhumain, tellement surhumain qu’il possède un orchestre personnel qui l’accompagne lorsqu’il déambule dans les corridors du théâtre… Véritable critique sociale, Birdman mentionne des propos actuels qui font énormément réfléchir en ces temps où le paraître prime sur l’être.

Alejandro Iñárritu a effectué un bon travail pour balancer le drame, ou du moins la lourdeur inhérente aux propos du récit, avec l’aspect comédie. Le long métrage de 119 minutes demeure excessivement drôle par moments. En fait, c’est forcément une des meilleures comédies de ces dernières années tant les blagues recèlent de propos matures et réfléchis.

Flanqué d’une bande-son bien particulière et d’un collectif d’acteurs incroyables et tous excellents, le nouveau bijou d’Alejandro Iñárritu nous amène un vent de fraîcheur indéniable, une aventure immersive que je qualifierais du calibre d’une œuvre de Wes Anderson. Toutefois, on regrettera parfois l’abondance du nombre d’acteurs célèbres, car leur temps de jeu s’en retrouve trop « fragmenté ». La réflexion humaniste que le film soulève me trotte encore incessamment dans la tête. S’il est encore à l’affiche, profitez-en pour aller le visionner au cinéma lors de votre congé des Fêtes!

6.5/7

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