Ven. Mar 29th, 2024

Par Dorian Paterne Mouketou

Le gouvernement de Philippe Couillard annonçait le budget provincial le 27 mars dernier. Celui-ci arrive après une période d’austérité qui a fait couler beaucoup d’encre et fait grogner une grande partie de la population québécoise. Quelle place le nouveau budget accorde-t-il au réinvestissement dans les établissements universitaires du Québec?

Combien recevront les universités?

Environ 173 M$ de fonds de fonctionnement seront transférés aux universités par le gouvernement libéral de Philippe Couillard (Plan économique du Québec 2018-2019). Ces fonds assumeront les coûts de fonctionnement des universités et ceux associés à la croissance de l’effectif étudiant. Des sommes qui n’ont pas réussi à convaincre entièrement la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU), qui représente la majorité du corps professoral régulier dans les universités francophones et anglophones. « Les sommes annoncées compensent à peine les compressions imposées aux fonds de fonctionnement des universités par ce gouvernement depuis le début de ce mandat. » Un souci que partage la présidente de la Fédération étudiante de l’Université de Sherbrooke, Annie Marier, qui a participé au huis clos sur le budget à Québec : « Pour la FEUS, le gouvernement n’en fait pas encore assez pour démontrer que l’enseignement supérieur est une priorité; nous n’avons même pas rattrapé le seuil que nous avions avant les coupures du gouvernement libéral, mais c’est tout de même un pas dans la bonne direction. »

Le budget Leitao prévoit 282 M$ consacrés aux immobilisations des universités, sur cinq ans (Plan québécois des infrastructures 2016-2026). La FQPPU soulève d’autres lacunes : « Celles-ci demeurent insuffisantes pour permettre l’entretien adéquat du parc immobilier universitaire, faisant craindre une hausse des virements des fonds de fonctionnement vers les fonds d’immobilisations. » Ces fonds s’ajoutent à un autre investissement de 187 M$ annoncé dans le Plan d’action numérique pour les universités et les cégeps. Le gouvernement du Québec souhaite mettre à la disposition des universités des fonds additionnels représentant un total de 295 M$ en 2022-2023.

Les stages rémunérés : à mi-chemin des objectifs

La FEUS reconnait l’effort du gouvernement libéral d’investir 15 M$ afin de compenser financièrement le stage final en enseignement. Même si cette nouvelle est bonne pour les gens étudiants en éducation, il demeure plusieurs laissés pour compte. « Cependant, nous sommes déçus que du travail reste à faire pour les autres stages qui ne sont pas payés, il est à noter que ceux-ci se trouvent principalement dans des domaines à connotation féminine », souligne Annie Marier, présidente de la FEUS.

Plusieurs mouvements étudiants se mobilisant pour les stages rémunérés ont réagi à l’annonce du gouvernement. Le Comité unitaire pour le travail étudiant (CUTE), auquel sont associés plusieurs regroupements étudiants à travers les universités de la province, implore le fait que malgré l’annonce du gouvernement, il demeure des programmes universitaires n’ayant pas accès aux stages rémunérés. Le mouvement CRAIES, qui a toujours fait pression sur le gouvernement pour des compensations financières pour les stages en enseignement, se félicite du coup réussi. Une réussite que célèbre également l’Union étudiante du Québec pour avoir rallié l’ensemble de la communauté politique.

La recherche universitaire laissée pour compte?

Les fonds consacrés par le gouvernement du Québec aux chercheures et chercheurs universitaires n’ont pas inspiré une lueur d’enthousiasme. La part du financement global aux fonds destinés à la recherche dans les universités québécoises est inférieure à celle qu’accorde le gouvernement canadien. Alors que Québec a annoncé des investissements supplémentaires de 20 M$ aux Fonds de recherche du Québec, la FQPPU soutient qu’il aurait été « souhaitable de marquer un plus grand coup en cette matière, à l’heure où le Québec cherche à se distinguer en matière d’innovation et à renforcer son économie ».

Annie Marier soulève le manquement du gouvernement sur la question des frais indirects de recherche (FIR), qui sont des frais perçus par les universités sur les subventions et les contrats de recherche qui ne peuvent être associés directement à un projet de recherche. « Pour la FEUS, le fait que le gouvernement n’ait pas considéré les frais indirects de recherche dans son budget est une preuve marquante du manque de vision du gouvernement en matière de recherche et d’enseignement supérieur. »

« Le financement des universités québécoises demeure aujourd’hui l’objet d’un retard préoccupant par rapport aux autres universités canadiennes »

La fin de l’austérité?

Les investissements annoncés par le gouvernement Couillard n’ont su combler qu’une infime partie des attentes. Le financement des universités québécoises demeure aujourd’hui l’objet d’un retard préoccupant par rapport aux autres universités canadiennes. Autant dire que le Québec devra compter sur son rayonnement économique pour combler les retards et les compressions dans le secteur de l’enseignement supérieur.

Avec ce budget « historique », pour emprunter le mot au ministre Carlos Leitao, le gouvernement du Québec étale des prévisions sur cinq ans, alors que les élections législatives provinciales se dérouleront en octobre. Avec un surplus budgétaire puisé dans des politiques d’austérité d’années de gouvernement libéral, Québec laisse place aux dépenses. Après tout, « on dépense l’argent que nous avons », nous dirait le président du Conseil du trésor, Pierre Arcand.

D’autres laissés pour compte

Les universités québécoises ne peuvent être les seules à se plaindre de quelques insatisfactions face au Plan économique du Québec 2018-2019.  Les groupes communautaires ont multiplié des annonces pour dénoncer ce qu’ils appellent un « budget à saveur électoraliste ». Des associations œuvrant dans la construction d’habitations communautaires implorent un manque de rehaussement de revenus adapté au milieu, qui reste difficile. D’autres organismes, tel l’Union des écrivaines et écrivains du Québec, préfèrent demeurer dans l’espoir d’attendre des politiques plus spécifiques dans les prochains mois.


Crédit Photo @ Gabrielle Gauthier

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