Mer. Avr 17th, 2024

Par Dominique Wolfshagen

Lors de leur plus récent passage à Sherbrooke, Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé ont fait une escale à l’auditorium de la Faculté des sciences de l’Université de Sherbrooke afin de parler d’indépendance et d’éducation. Retour sur cette conférence organisée par la branche sherbrookoise du parti ainsi que par Québec solidaire Université de Sherbrooke.

Des effluves partisans planent dès l’entrée dans l’auditorium : dépliants, macarons, table avec les formulaires pour devenir membre… Même impression pendant la conférence, qu’on sent très planifiée, « bien rodée », comme on dit : c’est là une campagne de relations publiques. Or, les rires et applaudissements qui ponctuent la rencontre font rapidement comprendre que les porte-paroles prêchent à un public déjà largement conquis.

Cette ambiance pré-électorale n’entrave pas l’approfondissement des idées présentées, qui portent sur deux thèmes principaux : l’indépendance et l’éducation. La période de questions permet par ailleurs de voir qu’au-delà du discours planifié, les députés sont bien au fait de leurs dossiers.

Le mouvement indépendantiste, une idée du passé ?

À propos de faire du Québec un pays, Gabriel Nadeau-Dubois évoque la tendance de plusieurs médias à déclarer que le mouvement indépendantiste est mort, que ce projet n’est pas de sa génération. Le député de Gouin réplique : « On n’a pas connu ces grands moments d’ébullition, ces grandes poussées collectives […]. On n’a pas connu les élans, mais on n’a pas connu les défaites. Les gens indépendantistes de ma génération se sont éveillés à cette cause-là dans un contexte où tout le monde autour d’eux ou presque répétait que c’était fini, que ça ne marchait pas, et qu’il fallait abandonner. »

Manon Massé défend également l’implication politique des jeunes, en soutenant que « la génération de Gabriel – votre génération – est politisée ». Elle croit que c’est le « ton méprisant » utilisé par certains politiciens qui nourrit un certain cynisme et qui peut démobiliser les électeurs.

« Ils coupent, ils coupent, ils coupent… »

La députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques en profite pour dénoncer ce qu’elle évalue être un manque de vision : « Ces vieux partis-là pensent que, dans le fond, la démocratie, c’est le vote aux quatre ans. » Selon elle, ils instaurent une période de coupures à profusion, suivie de réductions d’impôts lorsque les coffres sont renfloués – réductions qui amputent par la suite les revenus de l’État. « Ah! Il y a un trou! », caricature-t-elle, en rétorquant « ben oui, tu as baissé les impôts, innocent! Et il parait que c’est nous autres [Québec solidaire] qui sommes censés ne pas être bons en économie. Et pendant de temps-là, ils disent que vous n’êtes plus intéressés par la politique. »

Les coupures, Gabriel Nadeau-Dubois en parle aussi : « Entre 2010 et 2015, c’est un milliard de dollars qui ont été coupés dans l’éducation publique. Alors les 170 millions qui ont été annoncés cette semaine pour l’année financière en cours, ça n’arrive pas à la cheville de ce qui a été coupé dans les dernières années. »

« En 2012, j’avais l’impression qu’enfin, on allait remettre l’éducation au cœur des débats publics », se souvient-il. « J’avais espoir, suite à cette mobilisation-là, qu’enfin la classe politique ferait de l’éducation pas seulement un enjeu budgétaire dans le temps des campagnes électorales, mais que ça revienne vraiment au cœur de l’agenda politique », ajoute-t-il.

Revenir au rapport Parent

Par ailleurs, le co-porte-parole de Québec solidaire ne surprend personne en ramenant le sujet de la gratuité scolaire, qu’il présente toutefois sous un angle moins connu. « Ce n’est ni le mouvement étudiant ni Québec solidaire qui avait au départ formulé cette proposition-là », évoque-t-il. C’est plutôt le rapport Parent, qu’il désigne comme étant en quelque sorte le « certificat de naissance du système d’éducation au Québec ». Ce rapport, rédigé dans les années 60, a posé les bases de notre système d’éducation actuel, soit la création d’un ministère de l’Éducation, des polyvalentes, des cégeps, et ainsi de suite.

« Et dans ce rapport Parent, il y avait d’inscrit le projet de gratuité scolaire au moins jusqu’à l’université » […]. Et à l’époque – c’est fascinant – l’ensemble des partis politiques du Québec (le parti libéral, l’union nationale post Maurice Duplessis), tout le monde appuyait la gratuité scolaire, il y avait un consensus politique », explique Gabriel Nadeau-Dubois. « Aujourd’hui, on est plus loin de la gratuité scolaire qu’on ne l’a jamais été, et pas seulement au niveau universitaire : aujourd’hui, envoyer son enfant au primaire ou au secondaire, ça coute en moyenne 2 000 $ par année par enfant. »

Au-delà de la gratuité scolaire, le député croit qu’il faudrait aussi « renouer avec l’ambition du rapport Parent » en matière de sélection des élèves, une problématique qui ne concernerait plus seulement les écoles privées. « Il s’est développé, au sein même du réseau public, des programmes élitistes, qui font de la sélection, et maintenant, ces programmes-là existent même au primaire. Donc de dire qu’on a un système d’éducation à deux vitesses, c’est faux : on est rendu dans un système d’éducation à trois vitesses. Et ce que les études montrent, et elles sont nombreuses, c’est que la mixité dans une même classe, ce n’est pas juste bon pour les moins bons, c’est aussi bon pour les meilleurs. […] Parce qu’une classe, ce n’est pas juste des enfants devant un professeur, c’est aussi une dynamique. »

La conférence tire à sa fin, et les co-porte-paroles de Québec solidaire invitent les participants à les rejoindre en soirée au Boquébière pour prolonger les discussions… Tout en les invitant à s’inscrire comme membre avant de partir.


Crédit Photo ©  Martin Mailhot

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