Jeu. Mar 28th, 2024

Par Laurie Jeanne Beaudoin

Saviez-vous que la qualité de l’air que nous respirons pourrait avoir une incidence sur le développement de maladies auto-immunes? Une recherche lancée dernièrement menée par une chercheuse de l’UdeS tente de tracer les liens entre la diversité des arbres en ville, ce qui se trouve dans l’air et les maladies auto-immunes, et ce, dans le but de mieux adapter les villes pour les futures générations.  

Isabelle Laforest-Lapointe, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en écologie microbienne appliquée et professeure au Département de biologie de la Faculté des sciences, codirige le projet avec l’aide d’Alain Paquette, professeur au Département des sciences biologiques à l’UQAM et spécialiste en écologie forestière et urbaine. L’équipe de recherche est composée de sept chercheurs et chercheuses en sciences pures et en sciences sociales, de toutes les générations et de tous les niveaux d’expérience, ainsi que plusieurs personnes étudiantes en médecine, en sciences de la santé, en sciences humaines et en écologie microbienne et végétale. Prochainement, l’équipe aimerait aussi accueillir une personne à la maitrise ou au doctorat se spécialisant sur l’équité sociale ou sur les inégalités socioéconomiques afin d’allier des esprits de tous les domaines.

Quelles seront les répercussions?

Écologiste de formation, Isabelle Laforest-Lapointe se spécialise en écologie microbienne, soit l’étude des communautés des microbes. Au doctorat, elle a décidé de pousser sa recherche des communautés dans le domaine de la microbiologie et de la santé humaine. L’aspect multidisciplinaire de sa recherche lui a permis d’explorer comment les microbes interagissent entre eux et avec leurs hôtes, soient les arbres, les plantes ou même les bébés.

La chercheuse Isabelle Laforest-Lapointe

Comme l’a expliqué Isabelle lors d’une entrevue avec Le Collectif : « Le projet se veut multidisciplinaire puisqu’il se divise en plusieurs volets : l’aspect santé, l’exploitation des données de l’Institut national de santé publique du Québec sur les maladies auto-immunes dont les allergies et l’asthme, l’analyse des contenus polluant de l’air, microbe et pollen et l’étude de la distribution des arbres et de la végétation en milieu urbain ». Le projet considère le volet socioéconomique puisque les milieux urbains comprennent plusieurs quartiers de niveaux socioéconomiques différents, certains ayant un meilleur accès aux structures vertes que d’autres. Les infrastructures vertes sont très différentes d’un quartier à l’autre, causant certaines inégalités.

De plus, dans les trois premières années de vie d’un enfant, l’exposition à différents polluants, pollens et microorganismes peut grandement influencer le développement du système immunitaire et des maladies auto-immunes. Les jeunes générations habitent de plus en plus les villes, il s’agit donc d’un enjeu à ne pas ignorer. La recherche apportera certainement plus de réponses.

La pandémie, une porte pour la recherche

En 2020, le ministère de la Santé a confié un mandat de recherche relié à la détection des molécules virales sur les pollens à Alain Paquette et Isabelle Laforest-Lapointe. Cette recherche pour étudier la dispersion des virus était aussi l’occasion de détecter d’autres microbes. Une première subvention a été offerte à l’équipe, la subvention « Nouvelles Frontières », un fonds de recherche, créé à la fin de 2018, dans le but de soutenir des recherches canadiennes de calibre mondial, interdisciplinaires, à haut risque et à haut rendement, qui se traduit donc par un nombre important de retombées pour la population canadienne.

Le fait d’appliquer sur des subventions a permis à l’équipe de pousser la recherche plus loin et d’extrapoler son échantillonnage à la ville de Montréal et de Québec, ainsi mieux caractériser les pollens présents dans l’air à travers différentes régions. Le projet a alors pris de l’ampleur avec l’ajout d’une deuxième subvention, « alliance », fonds de recherche public et privé.

Fournir les connaissances pour adapter les villes 

D’ici la fin de la recherche, l’objectif est de livrer une application, un outil aux urbanistes, pour leur donner accès aux connaissances nécessaires pour aménager les espaces verts et la végétation de manière à soutenir la santé des populations urbaines. À Montréal, malgré les efforts de Justin Trudeau à vouloir planter des arbres en grande quantité, les arbres plantés en grande partie de type « mâle » produisent énormément de pollens. Les impacts restent donc les mêmes, les stratégies d’urbanisation sont à revoir.

« Notre système fait en sorte que la charge de la planification est fortement influencée par les personnes en développement immobilier, néanmoins, ils n’ont pas une vision de la ville à long terme ni la charge de gestion de la santé de la population […], car cela ne présente aucune valeur monétaire. Cependant, notre recherche pourra être une source de motivation pour les villes pour mieux encadrer et planifier la vie urbaine, si on ajoute la valeur de santé », ajoute Isabelle Laforest-Lapointe.

Recherches techniques et déroulement

La première séance d’échantillonnage a eu lieu au cours de l’été. Au total, 25 trappes ont été installées à travers la ville de Montréal, afin de tester les installations et de s’assurer de leur efficacité à capter les éléments qui seront étudiés. Il s’agit de la première étape vers le réel échantillonnage de l’été prochain. La recherche s’étendra sur deux ans et une année supplémentaire se rajoutera pour l’analyse des résultats.

Il s’agit d’une sphère qui n’a jamais été explorée auparavant. Notamment, la recherche multidisciplinaire apporte son lot d’obstacles. Comme l’explique la spécialiste microbienne, il peut être plus difficile de faire face aux problèmes lorsqu’il y a plusieurs domaines d’impliqués. Toutefois, les résultats auront potentiellement une retombée plus grande.


Crédit photo @ Michel Caron

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