Mar. Mar 19th, 2024

Par Andréanne Beaudry

En ce qui concerne le football, le fléau des commotions cérébrales est bien connu. Les nombreux contacts, entre les joueurs, peuvent occasionner des séquelles importantes au cerveau. Depuis quelques années, un autre sport figure sous le radar : la nage synchronisée. L’évolution du sport a fait en sorte que les facteurs de risques sont devenus plus élevés en raison des acrobaties et des mouvements plus secs qu’exigent les duos ou les routines d’équipe.

Qu’est-ce qu’une commotion cérébrale?

Même si la définition d’une commotion cérébrale est pourtant simple, certains éléments sont négligés en ce qui la concerne. Généralement, elle survient suite à un coup direct à la tête. Cependant la commotion peut être aussi provoquée en conséquence d’un coup au corps; l’impact causera alors une onde de choc transmise au cerveau. L’analogie suivante représente bien l’importance des dommages que peut engendrer une commotion : les résultats démontrent que les séquelles liées au sport sont comparables à celles que peut laisser un traumatisme craniocérébral léger lors d’un accident de voiture. On estime que la force d’accélération moyenne nécessaire pour donner lieu à une commotion cérébrale est de 80 à 100 g (le g est considéré comme l’accélération d’un objet soumis à la gravité terrestre). Le tout équivaut alors à une voiture qui frappe un mur de brique à 60 km/h.

Les risques de la nage synchronisée

La nage synchronisée se compare facilement au football; les nageurs et nageuses subissent presque autant de commotions cérébrales et de dislocations que les joueurs de football. En routine, les poussées acrobatiques (une poussée plateforme, pyramidale ou éjectée) entrainent dans certains cas des blessures importantes. Lorsqu’une fille est propulsée hors de l’eau, son amerissage se fait très rapidement et cela peut même provoquer une collision avec les autres nageuses. D’ailleurs, il n’est pas rare de recevoir un coup de pied ou de genoux sur la tête. Même l’environnement des nageuses, entre autres le sol glissant au bord de la piscine, est considéré comme un facteur de risque.

Une préoccupation importante

Pour Synchro Québec, la situation est plutôt préoccupante puisque le sport a énormément évolué depuis l’époque de la nageuse olympique Sylvie Fréchette. Le nombre de commotions a augmenté en ce qui concerne la nage synchronisée. Actuellement, les patrons (l’ensemble des différentes positions attribuées aux nageuses) sont plus rapprochés et les mouvements sont exécutés de manière plus sèche. Sans oublier que les équipes incorporent dans leurs routines des figures, mais également des acrobaties plus impressionnantes qu’autrefois. Impliquée depuis 33 ans au sein du sport, la juge Claudia Beaulieu, notamment ancienne nageuse et entraineuse en nage synchronisée, confirme cette réalité.

Un exemple à suivre

En raison du taux élevé de commotions constaté depuis quelques années, la Fédération québécoise de nage synchronisée, plus avant-gardiste que le reste du Canada, a jugé important d’adopter des modifications pour protéger les athlètes, particulièrement en ce qui a trait aux actions à suivre après le coup. Les entraineurs ne sont pas suffisamment informés et outillés par rapport aux commotions, et c’est pourquoi ils sont amenés à suivre des formations à ce sujet. D’ailleurs, le Protocole de gestion des commotions cérébrales en nage synchronisée rédigé par Synchro Québec rappelle qu’il « est important de souligner que l’absence de signes et de symptômes ne garantit pas qu’un athlète n’ait pas subi de commotion cérébrale ». On mentionne également qu’un athlète sur cinq ressent les symptômes 24 heures suivant le choc. Puis, malheureusement, la moitié ne révèlera pas ces symptômes pour ne pas devoir arrêter son sport. En cas de doute, l’entraineur doit suivre la règle du moindre soupçon : retirer l’athlète de l’entrainement et surveiller l’apparition de signes ou de symptômes pour une période d’au moins 48 heures. La Fédération veut encourager les entraineurs à ne pas négliger cet aspect pour éviter d’hypothéquer les athlètes. De plus, l’âge, le sexe et le nombre de commotions subies auparavant par l’athlète influencent l’évolution des signes et des symptômes. Ceux-ci peuvent être de nature physique, cognitive et émotionnelle. Sans tous les nommer, une commotion peut provoquer chez l’athlète les symptômes suivants : des vertiges, de l’amnésie, de la confusion ou de l’irritabilité.

D’autre part, la Fédération de Synchro Québec s’inquiète davantage pour les jeunes athlètes, puisque la plupart ne sont pas encore assez matures. En outre, les entraineurs engagés possèdent souvent une certification de niveau 1. La notion des commotions cérébrales s’ajoute à la formation à partir du niveau 2. Depuis 2015, la Fédération a mis en place des mesures de sécurité, dont plusieurs changements dans les règlements de compétition. Les catégories incluant des jeunes de 10 ans et moins ne peuvent incorporer au sein de leur routine des portées plateformes, pyramidales ou éjectées. Pour ce qui est des 12 ans et moins, on interdit uniquement les éjectées. En tant que juge, Claudia Beaulieu rappelle que « si les nageuses ne respectent pas les règlements imposés, celles-ci se voient alors pénalisées dans le pointage par équipe ».

Prévenir : processus de réhabilitation important

On ne peut pas éviter les commotions cérébrales. Par contre, il est important de miser sur une bonne réhabilitation, selon la Fédération. En effet, cette phase n’est pas à négliger puisque les jours qui suivront la blessure seront critiques pour la récupération du cerveau. L’athlète doit passer par six étapes distinctes avant de retourner à l’entrainement. Une reprise graduelle des activités intellectuelles ainsi que de l’entrainement physique est nécessaire. Selon un document de l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (Québec), « le non-respect de ces consignes peut prolonger, aggraver, voire rendre persistants les symptômes après un TCCL. Il est fortement recommandé de ne pas prendre un tel risque ». On mentionne également que les athlètes retournant à l’entrainement trop rapidement courent entre trois et cinq fois plus de risques de subir d’autres commotions. Les séquelles deviennent plus importantes, voire jusqu’au décès lorsque les conséquences sont majeures.

La nage synchronisée comporte des risques, et ce, presque autant que le football. Cependant, il est possible d’adopter des mesures pour contrer le phénomène : miser sur un meilleur encadrement des entraineurs et sur une réhabilitation adéquate de l’athlète.


Crédit Photo ©  Gabrielle Gauthier

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